samedi 30 juillet 2011

Dante X (dise tant de...)




C'est comme ça tombe. Mais tout en demeurant proches de l'Italie, ou est-ce un autre lieu que Florence où nous devons trouver ce jeu d'entonnoirs qu'est la Triple Comédie ? La traversée est faite de brouillard et tourbillon. C'est cette fatigue des jeux les journées entières devant l'écran, Ciel, Enfer, difficile Purgatoire. Purgatoire à peine dans les pauses, dans les interruptions impondérables du sommeil physique, au grabat, derrière le cache-misère. D'où l'on sort sonné se rasseoir sans passer par la salle de bain ni la cuisine, la colle aux yeux. Purgatoire si méprisé qu'il nous laisse une trace épidermique, prise de sang, bouton éclaté, mycose... dont nous ne parlerons surtout pas, soit des rêves, des constats.

C'est comme ça tombe, c'est dire "c'est comme sa tombe", à Dante, qui n'est pas à Florence, mais à Ravenne. Elle aurait été profanée par des fondamentalistes musulmans. Une histoire assez risible. Tout comme les cérémonies sataniques au Père-Lachaise sur la tombe de Jim Morrison. Que cela se passe à la sereine (et je prie aux vénitiens me pardonner de leur soustraire l'épithète) Ravenne (mais ça rime), devrait montrer la monstruosité induite par la Comédie elle-même. Il manquait "la touche". N'avait-il, pour besoin d'écriture, soustrait Béatrice et Virgile à leur songe sans fin ? Que les fanatiques de nos jours, venus d'un colonialisme à rebonds, fassent à leur tour soustraction des dépouilles... là où ne tenait lieu que le mille fois répété portrait posthume, un profil fourni par la caricature du topique, toujours le même... semble la juste répétition d'une structure dantesque.

Les gestes de la parole, les figures, les gestes de l'écriture, viennent d'une violence réelle et semblent avoir la vocation d'une refonte dans le réel d'une nouvelle violence. Pour ce que je viens d'évoquer. Sinon, dans l'art, je viens de trouver un article en italien sur mon ami Alain Arias-Misson, épigone du "public poem", qui peut nous illustrer sur la façon dont, même au sein de l'Art, ce glissement (je prends le mot sans trop de réflexion... cette refonte...) est une répétition au même degré qu'un symptôme :

sette attori, ognuno con una lettera del titolo appena citato, crearono una serie di scritte davanti al Parlamento come luogo dell'amministrazione politica e dell'esercizio del potere, che partivano dal lemma «arma» - ben coglibile da tutti nella sua provocatorietà - per arrivare al lemma «amar», un augurio ironico e definitivo al regime e ai madrileni. In The public Shamanic Chapel Sistine Poem del 1998, invece, 14 personaggi, che indossavano maschere sciamaniche, si gettavano sul pavimento sotto la creazione romana di Adamo, sublime opera di Michelangelo, accompagnati da rumori animali: guardare per terra, invece che verso il cielo, fu l'azione semplice, ma efficace ed inconsueta, che il primordiale gesto produceva, sotto gli occhi stralunati di prelati attoniti. (Gian Pietro Guiotto)

Regarder par terre, et non vers le Ciel où se trouve la figure, la représentation d'Adam, nous amène au vrai Adam, celui qui est fait de boue, de porcelaine brute et d'un souffle avili.

Pour cela il faut une "circoncision du coeur", dont nous parle Aboulafia, et une distinction qui ramène notre attention de la parole (logos) au Nom (lettre ou nombre). Pour pouvoir regarder où se trouve l'homme, en vérité. Pour ne pas le chercher ou en faire le "catalogue" de son destin. Béatrice, tout comme d'autres figures féminines, est la parole qui nous donne Dante du mensonge poétique. Les lecteurs ont retenu l'Enfer peut-être en bonne santé, le Nom est dans le feu de la lettre, dans les statistiques insultantes de l'Enfer, numérations tatoués par des sadiques du poème, métaphysiques, et pour cela bestiaux, chimériques, hallucinatoires... je ne peux pas m'empêcher de penser à un chef-d'oeuvre récent, l'Enfer peuplé de soldats nazies des frères Chapman... parce que là-bas l'on n'invente La femme, l'on ne ment plus. J'y ai trouvé Vanni Fucci, dont la nomination et la désagrégation du discours, qui se dénonce et se fond dans la refonte agissante, plastique, des métamorphoses pulsantes du voleur en serpent et du serpent en voleur... donne sur la violence maximale du blasphème, presque un péché physique pour atteindre la qualité de pêché de la pensée par excellence.

Et là où se tient la métamorphose l'on manifeste des vérités, tout en sachant qu'elles viennent chiffrer l'intensité sous le tiers unitif de toute duplicité. Mais mieux qu'un oracle d'ordre analytique est qu'on retourne à l'exercice de traduction. Voici Spenser et son Faerie Queene, inspiré de modèles italiens :

Lo now she is that stone, from whose two heads,
as from two weeping eyes, fresh streames do flow,
yet cold through feare, and old conceiued dreads,
and yet the Stone her semblance seemes to show,
shapt like a maid, that such ye may her know,
and yet her vertues in her water byde,
for she is chast and pure, as purest snow,
ne lets her waues with any filth be dyde,
but euer by her selfe vnstained hath beene tryde.

Ce qui en lisant les débuts de ver donne : Lay as a fornicator butt

Viens te coucher, pour que ton cul baise

Portrait et éloge d'une statue de sel, d'une métamorphose en sculpture, d'une mort symbolique dans la duplication.

Hélas en ce moment elle est cette pierre, bicéphale dont,
comme de deux yeux en pleurs, fraîches ruisseaux coulent,
quand le froid de par la peur, et les anciens desseins incubés,
c'est quand le Marbre son semblant semble montrer,
"smarted up" comme une jeune fille, qu'ainsi du devrais la capter, elle,
quand sa franchise tu lis dans l'eau que d'elle ruisselle,
puisqu'elle est la nature et l'air pur, la neige qui perdure,
qui ne penche ses flots sur des sables parsemés de pourriture,
puisque sa forme ou son nom n'a pas encore pensé à essayer une teinture.

Le regard qui transmue les deux bouts de l'échelle de Jacob.


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