mercredi 31 août 2011

The Doors - Riders on the storm

Le Repas Frugal, 2011


dessin au crayon



Shemihaza donne naissance à deux fils,
Ohya et Ahya. Le premier
de ces deux frères combat le dragon Léviathan,
le second s'attaque à Mahawai, fils de Virogdad.
(...)
Aux exploits et combats des géants contre les monstres
et entre eux, succédait une gigantomachie fantastique
qui prenait fin, comme dans l'Apocalypse d'Hénoch,
par la victoire d'une tétrade d'anges
(Raphaël, Michel, Gabriel, Istraël) sur les forces
conjuguées de l'anarchie démoniaque.

Sifr al-jababira
(compte-rendu de Michel Tardieu)



Excusez-moi du dessin dans la précipitation, il se veut "notation" d'une gravure de la Période Bleu de Picasso. Ayant connu dans un vernissage une fille qui voulait se vouer au chant lyrique, mais qui avait reçu une "main courante" pour vocifération, même si sa voix était travaillée par des années d'étude et de mortification, et qui gagnait sa vie dans les bureaux qui gèrent les droits sur toute reproduction imaginable de l'oeuvre de Picasso, les minuties de l'agence et le mal qu'elle se donnerait, cet ange, à gérer un procès contre moi, m'interdissent de vous livrer un quelconque aperçu du génie espagnol. Même moi, je me suis senti contraint à faire ma copie à la va-vite et mettre en relief la distinction entre Lui et... moi.

Si cela m'a semblé opportun c'est à cause du commentaire qu'en fait John Berger dans son bouquin sur la réussite et l'échec du peintre espagnol. Je pense que la brochure anarchiste publiée en Andalousie qu'il prend pour point de départ de son commentaire est libre de droits et priée de diffusion :

"Il existe sur cette planète une accumulation infinie
de richesses qui, s'il n'existait pas de monopoles,
suffirait à assurer le bonheur de tous les êtres humains.
Nous avons tous droit
au bien-être, et quand l'Anarchie sera instaurée,
chacun de nous prendra dans la réserve commune
ce dont il a besoin.
Les hommes, sans distinction, seront heureux.
Dans les rapports sociaux, l'amour sera la seule loi."
1904

S'ensuit dans le livre de Berger une reproduction du Repas Frugal de 1904 et les lignes suivantes que je me retiens à peine de citer, tellement elle me semblent nécessaires pour vous :

"Les deux personnages attablés ici ont perdu depuis longtemps pareil espoir. Cette candeur les ferait rire. Mais (puisqu'il est vrai que les espoirs des anarchistes manquent de réalisme), qu'ont-ils gagné à ce progrès ? Que leur a apporté leur surcroît de connaissances et d'expérience ? Un profond mépris de la réalité et de tout espoir, pour les autres comme pour eux-mêmes. Aux yeux de Picasso qui les considère selon la logique de la ville européenne, leur seule valeur est de représenter l'antithèse des bien nourris. Ils ne se revendiquent aucun droit, à peine celui d'appartenir à l'espèce humaine. Ils ne revendiquent que la maladie pour flétrir la santé vulgarisée et monopolisée par la bourgeoisie. (...)"

Une autre raison pour copier ou pour "traduire" Picasso est l'éloge qui fait Gabriel Matzneff souvent de l'intérêt que des peintre cubistes et apparemment irrévérencieux comme lui portaient à visiter régulièrement le Louvre et admirer ses richesses. Je dois dire que ça m'a touché, parce que j'ai passé un total (après déduction des visites accompagné par des femmes) ahurissant de journées au Louvre et que ça me manque. Bon, si mon Montero n'est pas assez Picasso, dites-vous qu'il est temporairement Daumier (ouais, plus... "d'Orsay") comme vos artistes de pure-souche et catholiques que vous aimez tant, soyez pas tricheurs...

Après il est très facile de me faire passer à leur côté pour une sorte de Douanier Rousseau dans le Repas à son honneur organisé par Picasso, et par l'exquise intelligentsia du moment et qui est démonstrativement raconté par Norman Mailer. Mais ces gens-là "aimaient" Rousseau ? L'on ne pourra le savoir. Il est inutile de projeter notre temps sur ces gens que la parabole rend opaques. Ceux qui sont transparents sont mes amis, et même ceux de mes amis qui disent être mes ennemis... tous des amis, mon cul !!

Plus ils sont sur le piédestal de l'Histoire, moins on pardonne aux amis le mépris.

"Je ne suis pas un mirage, J'ai faim", dit un écriteau porté par un courageux mendiant agenouillé toujours, quand je le croisse, dans les faubourgs les plus chics qu'il m'arrive de transiter. La vision, le pas-mirage, la peinture.

...

lundi 29 août 2011

sur la traduction performative


http://soundcloud.com/manuel-montero/anuncio-del-rocio-the-season


L'artiste partage certains traits de la figure du chômeur. Un cas d'artiste flagrant et commun certainement avec toute position précaire est le fait que souvent la socialité n'apporte plus une augmentation des repères et des points d'appui pour "rebondir", mais peut amener à une aggravation du précaire, encore plus que si l'artiste avait choisi la solitude et l'insensé de se définir "a priori" en tant que "maudit".

Ceci dit, la conséquence chez le peintre de l'effort social est la multiplication des projets, et le côté "art total" ou "Léonard da Vinci" (c'est à dire : être un touche-à-tout). Les choses en sont là pour moi depuis le début de ma prise de conscience en tant qu'artiste, autour de mes 19 ans. Depuis cette âge-là j'envisageais d'être peintre, mais aussi d'ajouter la création musicale, dont des opéras, et bien d'autres activités qui pourraient se rejoindre dans l'écriture. Le cas venu d'avoir pratiqué des enregistrements sonores et d'avoir traduit de la poésie sur une modalité "vitesse", m'amène, par exemple, à avancer l'hypothèse d'une nouvelle pratique artistique : la "traduction performative".

Qu'elle ait lieu dans la rédaction écrite, où il n'y aurait de prime abord de distinction d'avec la traduction littéraire, ou qu'elle soit plus exactement de la "performance", dans les cas irréfutables où nous avons allumé l'enregistreur, ouvert un recueil de poèmes en n'importe quelle langue un peu connue de nous, et que nous nous soyons mis à réciter dans une langue différente tout en essayant de nous exercer au "chantant" du poème classique, il y a lieu du "performatif" dans les deux cas.

Dans le cas où cela semble se passer comme s'il en était d'une "traduction littéraire", c'est le choix délibéré de langues mal connues, l'introduction intentionnelle, si l'on peut dire, de "l'arbitraire". L'introduction de force de l'étymologie et son côté sonore en dépit des intentions créditées... Et nonobstant cette étymologie "de force" n'est pas "violente" mais "non-violente", bouddhique on dirait, puisqu'elle accompagne le sens et en donne une finition artistique au hasard qui découle de l'ignorance accumulée en vitesse, ramassée par la lecture "surprise". Le contexte aussi, ce que j'appelle le "bloggy"...

Pour ce qui est du passage ou dérivation en musique, je trouve intéressant de demander quelques pistes au jeune romancier Arthur-Louis Cingualte, qui m'a mis sur une piste inouïe, celle de l'astrologie précolombienne... C'est dans cette direction-là que je compte produire cette année des "berceuses intellectuelles" dont je me réserve l'antériorité envers et contre tout. Merci, bonne nuit.

dimanche 28 août 2011

Deux pastels de nous (et deux poèmes)

rectificando
invenies opus


...

Semblable au chant est le silence de l'amant

quand nous lisons des rêves de gourmandise dans les sourcils

d'un livre abandonné quelque part avant que…

…non, à peine, il est arrivé nu chez toi

il marchait sans chaussures les couloirs du ministère

tes lunettes l'excitent, il répète sa musique

l'urine chantante, l'eau coulante, le ciel est éphémère

par la lucarne il montre un bleuté plaisir

lyrisme des cuisses ruisselantes et la soie paroxystique

d'une photo de ton buste qui doit rester comme une drogue

dans la boite métallique des secrets de l'orgasme

dans le spasme du soupir et du duetto d'impertinence

des postures ou la bouche réciproque s'occupe

à lire la saveur de l'obscène innocence du jardin

et de l'impatience et de…

…dans ces situations agréables…

quelques fois la peinture est témoin d'un parfumé frisson de…

… l'énergie manifeste qui s'occulte soudaine dans le cendrier des hanches

… les mots entrelacés qui tiennent chaud dans la danse du souffle

… les topiques morsures de l'histoire personnelle

que je mêle à ta langue de mes lèvres de louve,

la jouissance qui couve sa coquille d'ambroisie pour…

ah, délicatesse indigne du corps, on augmente sur le détail le rythme du deuil

puisque le seuil de l'oubli est couvert de miel

… les supplices de l'enfance, les lettres penchées,

les crèmes qu'on avale,

les princesses dans les gravures,

sont les moisissures d'une pensée d'amoureuse

les acides ancêtres qui s'éveillent au liquide d'une coupe de sueur

et aux raisins rares de tes seins et de la courbe

généreuse de tes desseins.





...

le pastel du plaisir est la poussière d'argent

et son sel, le papier baryté est dans le tirage

d'un amant dans la répétition du temps

*

ici commencent l'excès et le vice

dans la transe de beauté du réel de l'image

quand elle lèche juste à la naissance

d'une expérience imperceptible pour le siècle

deux artistes au tournoi nébuleux d'un tendre escarboucle

ou d'un lion à deux têtes

...

Siesta y adivinación


ectoplasma de Eileen Myles




Queridos caballeros del futuro :

De los párpados de flor azul y de la tinta y la sepia nocturna

en las pestañas rápidas como arañas,

y de la Luna Nueva que es pupila de amapola

de la rubia Eva en comunión con la serpiente y con la paloma,

respiro por los labios la mirra y por la yema el tacto del sonido,

desde una Roma cubicular a ustedes los conjuro y los convoco.


Vengan a ver el sueño intermitente del árbol del paraíso

cuando sus hojas naranjas disuelven en un charco de escritura

la verdura sensual de un bíblico verano.


Vengan a ver el sueño de un autobús que yo no alcanzo

a tiempo, y que me deja pensando en hacer poesía,

antes del ascenso en la dharma y el descenso del destino.


Vengan a ver a dos niños, mujer y varón, de la mano

en las cornisas del agua fresca entre la hojarasca del bosque,

que llevan al peluche muy lejos, a un estante en alguna biblioteca,

o al gato a su leche y su sardina, a su mundo adulto y discreto.


Vengan a ver una procesión de penitentes, con un perro

clavado en una cruz, en miniatura recorrer dolientes la moqueta de la entrada,

allí donde mis botas se desprenden del afecto impuro

de la ciudad y de la maravilla negra del destierro.


Queridos caballeros, vengan a recordarme el sonido

del teléfono que transforma el poema en manzana perdida,

cuando una cana proverbial de encantamiento al quejido

se parece de una máquina del futuro como se asemeja

al agua el hueso del monte, al fuego la divina corneja.


Sueños, delicias de turquesa en los ojos entreabiertos,

caricias en la grupa y en los senos, la mano femenina

reinando sobre el ardiente pergamino a la sanguina.


Estar medio despiertos y querer escribir, escribir invitaciones

al mundo por venir, a las estaciones que anuncian el invierno

con colores de fuego, como si la cruda nieve pudiese otra vez

servir de juego, y la perfección del amor hubiese consistido

en haberlo perdido y esperar

en la siesta otra calada de pipa o de tabaco.


Gracias por el cabotaje de apóstol requerido en la lectura,

gracias por la premura con que ustedes toleran el poema que me apura,

solamente gracias, y un saludo, hijos del tiempo y del huevo

de murciélago del oscuro espíritu, y de la escama del pez.


Si así empecé, así termino, los conjuro a ustedes

a ver el parpadeo azul turquesa de la tórtola del sueño,

queridos caballeros del futuro.

...

oráculo extraño y destemplado
que ha salido y que dejo a la vista para reflexión :


tíos, estoy dando calidad ¿comprenden?

la gamberrada de etiqueta sabe hacer cine

de cada siete días de espera del fundido en negro

y sacar a colación lo inoportuno

de una unión sexual o de una verdad

y esta es la gracia de dios en la peseta de mi sonrisa

que descamisado y sin misa quiero ser enterrado

...

gota a gota


En la sima monstruosa del fregadero

donde los restos de estos días se pudren y se secan

me quedo absorto y soy despedazado

pues la tauromaquia de Orfeo ha terminado gota a gota

su sangre cenicienta, su calcinada humedad y su anodino acero.

Veo los alimentos ya inútiles, mi desidia y mi tristeza.

Veo los ángeles que se pliegan el la palma de la mano del profeta.

Los sonidos matinales, ahogados, como soterrados disparates

se infiltran en el aire rancio ahora ya vacío de libros

donde mi estudio condujo a ser columna de humo,

ya que el fuego de Dios no conozco, y la mala hierba humana yo consumo.

No temo, no siento, no desespero,

tan sólo soporto mi escuálido cuerpo. Mis manchas

de salsa con la uña del dedo las arreglé, hacía tantos días

que decoraban con su sordo horror la envoltura de mi cuerpo.

Mi camisa es blanca, del amor la única inocencia

de la raza masculina es la blanca tinta y el árbol del cuerpo.

Mi cuerpo, el precio del tiempo, que entrego por limosna a la locura,

y que me pide el beso de la araña roja de tu boca, la dislocación

de tus ojos de orgasmo, que esperan aún

en el aluminio esplendente de una perdida mirada de porcelana.

Vendrás con un aire incomprensible, acompañada de presencias,

ése será el futuro irreversible del rápido coito de Orfeo,

el descenso en la profunda cama de una tumba,

la amistad que sólo es sutil entre pavesas de justicia,

pues así llamo a tus dos brazos, dos amigos a mi lado,

las manijas de las lágrimas calientes en la funda salomónica de tu pubis,

la paradoja de un triángulo de deseo, la jalea de Venus, en eso pienso

cuando miro el fregadero, el pitillo suspendido es la hoja

del otoño, y siempre estuvo la nieve excitada en el trópico

de la puerta de mis dientes que caen como granos de azúcar.

Imagino que Euridice murió, tan sólo un dato apenas escrito,

si se puede así llamar al grito del átomo en mi alma vacía,

abrí la puerta, entré dentro, consumí las horas

ensucié las tazas y los platos, terminé el tabaco.

En pocos minutos como un ladrón despojé mi casa,

primero en maletas, un día, quizá el mismo

intento, en bolsas rotas y oscuras, inflamado

y cruel de actividad hice llamadas,

fui a otros lugares, mis libros están lejos, ahora que regreso

está la espera de encontrar tu alma en el Infierno

y una escalera donde el vértigo aconseja no perder tu recuerdo.

...

vendredi 26 août 2011

Notes sur Patience Tison et son oeuvre (2)


Yeratel
Patience Tison, 2011



dessin par Patience Tison
faisant partie d'une suite
datant d'autour de vingt ans





étude récente
(Juliette ?)
par Patience Tison
d'après nature



...


Un espace de vingt ans entre deux dessins, dont on pourrait faussement déduire des années de recyclage, de soudoyer les uns et les autres, de se tenir pour partie d'une société, de "changer"... et non, le principe de réalité de la sculpture, la vie sauvage de célibataire femme, le donner dans le "théâtrique" de ses grand-parents, Pierre et Denise Klossowski, aussi bien dans le dessin le plus ancien que dans le tableau de cette année, le fait que le dessin soit une affaire qui peut organiser de bout à l'autre l'intime, sont toujours les mêmes. Il y a dessin et dessin, il y a le dessin "oeuvre" et le dessin "pratique", tous deux artistiques et inter-communicants...

Voici un ange gardien, Yeratel, qui nous force à faire le récit d'un vécu du fantastique, qui empêche dès qu'on s'essaie de sincérité toute déviation vers l'indiscrétion et le réductionnisme de la langue de bois, de la "mauvaise langue" de "bois"... Ses couleurs sont le gris parisien tendu jusqu'au paroxysme vers le nocturne rouge du vieux sang moyenâgeux, et ses attributs sont une tête chauve de femme, un poignard (emblème tragique qu'ici signifie le "toucher" de l'ange, la blessure et le bonheur d'un stigmate...), les ailes de gargouille lithographique très XIXe, très décadentes...

Si l'on revient en arrière vers cet autre dessin, le plus ancien, qui est mon préféré d'une complexe série et que je vous montre sans prendre compte l'ordre chronologique du récit qui tient lieu, l'on observe l'origine théâtral du poignard, la division du tableau en trois plans, définis par Patience Tison comme La Réalité (en bas à droite), L'Imagination (diagonal central) et l'Inconscient (en haut à gauche), nous verrons dans Yeratel tout un mouvement qui le parcourt rendant présentes ces instances dans le frisson et la flamme de son vol...

Si l'on tient compte que le travail de sculpteur, contre toute attente depuis le mythe classique (voyez sinon le Rêve de Lucien de Samosate), n'est pas physique ou abrutissant, mais beaucoup plus cérébral et prémédité que la peinture, et que l'on considère la teneur dure de passage ou traversée du dessin d'après pose (souvent avec la poète Juliette Bagouet), l'on se doit de dire qu'il signifie le "pas par hasard" de chaque personnage apocalyptique dans les tableaux récents à l'acrylique.

(trouvez une suite en annonce d'expo faisant clic sur ce lien)


...

Notes sur Patience Tison et son oeuvre


grand dessin au crayon couleur
Patience Tison, 2011



Nous avons tous les pieds sur terre, mais pas tous au même étage.
(phrase automatique d'incipit)

Le sentiment de ne faire ici que du "volontarisme", depuis ma position de confrère, d'ami depuis plusieurs années, et d'admirateur (j'aime et je suis fan, mais en plus je me sens proche des mises en scène, je partage le choix de la figure humaine...), et malgré ma formation universitaire, est l'accablant sentiment qui s'impose parmi d'autres difficultés pour attirer votre attention sur l'oeuvre de Patience Tison, aussi bien picturale (dessins de format très variable et acryliques) qu'en sculpture, son domaine le plus spécialisé.

D'autres démarches sont à considérer depuis les exigences du marché et l'institution contemporaines. La biographie elle-même, les projets d'installation, d'enregistrement sonore, le choix risqué d'une tradition familiale, le savoir faire et sa confrontation à d'énormes difficultés, l'imaginaire qui autant pourrait nécessiter d'un label "art brut" que d'un autre label à définir, le rendant voisin du théâtre de la cruauté et de la science-fiction pour certains travaux...

Venant de son atelier, avec des photographies d'une partie de son oeuvre prises en sa compagnie par Eve Livet et par moi-même, je ressentais un puissant souhait d'écrire en longueur sur chaque aspect à prendre en compte pour une mise en valeur et en contexte. Je me sentais tenté de donner le meilleur de ma prose et de mon temps, et j'essayais de garder dans la mémoire les idées. Je me voyais auteur d'un roman presque plus que d'un article, d'un essai sous forme de monographie subjective plutôt que d'un compte-rendu ou d'un court essai. Je me suis assis prendre un café à la terrasse d'un bistrot et j'ai discuté avec Eve Livet des difficultés de faire entendre tout ce qui devait être dit sur l'oeuvre de Patience Tison.

Désespoir, angoisse, silence, des mots venaient autour du café et du jus de pamplemousse. Et c'était plus que de simples mots qu'on fait sortir de soi et qu'en les communiquant ne nous concernent plus. Je voyais l'entreprise même de la peinture, ma propre biographie, si semblable soudainement, ma poitrine qui se sentait opprimée par le café crépusculaire, toutes choses... soumises au dictât de ces trois mots : désespoir, angoisse, silence.

Ai-je le droit de pointer le courage du choix contumace de suivre la tradition de Pierre Klossowski, son grand-père, et de Balthus, ayant grandi dans les ateliers de travail de l'un et de l'autre, quand la reconnaissance n'est pas au rendez-vous et le refus et la condescendance sont presque les seuls résultats de décennies de travail ?

Semblablement la question doit attendre sa réponse, et cependant il doit suffire d'entamer ici un projet de "notation" au fil de quelques images, et le plus serré possible des sujets représentés et des nuances dans les hauts et les bas de l'adresse technique, à la manière dont étaient jadis commentés les vieux tableaux.

Je ferai de mon meilleur, au vu des oeuvres et abstraction faite des difficultés.

(voici en lien la "note 2 sur Patience Tison")


...

jeudi 25 août 2011

Sur Dante XXIII


bicéphales au bleu de lectoure

(Sur Dante, cliquez ici pour reculer dans le texte)


Reprenons la question des sources solvables en littérature, puisqu'on y fait de cela. J'entends à présent le son d'un film en allemand sur les neuf ans que Proust alité à été accompagné de Céleste, donna angelicata dans le film allemand et même dans celui de Raoul Ruiz. Avec justesse, je ne doute pas de ce trait essentiel, mais mielleuse et didactique projection dans le docudrame allemand. L'actrice est charmante et aurait peut-être pu être cadrée, montée, autrement par le "metteur en scène"... Je regarde à travers le rideau parfois, j'apporte les trois volumes de La Pléiade... et je me rends compte que ce sera aussi par le commentaire des illustrations (filmiques dans ce dernier auteur) que je parviendrai à me faire un plan de lecture de la Recherche, si j'eusse le conatus ou la prétention de "l'avoir lu".

Mais si je vous parle de cela, mis à part le fait que j'entends encore en train d'écrire cette austère et sentimentale langue qu'est l'allemand, parsemé ici des mots français "Monsieur" et "Monsieur", c'est parce que je venais de faire allusion au manichéisme et que le seul roman moderne issu de cette expérience en sont les Confessions de Saint Augustin, mais du coup mon estomac me prends avec les deux grosses quenelles, "façon Closerie des Lilas", que j'ai dîné. L'humour d'avant-garde de Raoul Ruiz va nous manquer. Il a rendu une belle découpe en deux de "La vocation suspendue" et un patch-work, si je peux dire bêtement, de la "Recherche", qui restent l'équivalent d'une oeuvre de peintre...

La langue allemande, elle est loin d'atteinte, mais un peu moins que l'arabe... oserai-je traduire quelque chose ce soir ? Quelque chose dont la "pertinence" fasse "kling" ? En même temps, si je veux être crédible, il faut une traduction suffisamment tirée par les cheveux, qu'elle n'ai pu avoir reçu de tournure que la mienne. Et qu'elle soit utile pour "comprendre Dante" est plus qu'une exigence, c'est la sommation qui pèse sur les sources de l'inspiration...

La digestion tellement souvent évoquée par Salvador Dali. Et oui, entre l'Hôtel Meurice et la Closerie des Lilas, il y a ce raccourci du "homard au chocolat" que selon Ignacio Gomez de Liano, préparait Gala pour les invités de Dali en suivant une recette catalane. L'arrière goût des quenelles, spécialité lyonnaise, quand elles reçoivent la touche du bouillon de homard, et puis la presque certitude ça et là de l'utilisation du "pimenton" en poudre typique de l'Espagne...

Le "pimenton" revient à être l'ingrédient onirique le plus puissant de la gastronomie, capable de m'avoir fait concevoir au cours d'un rêve une "recette de cuisine" consistante et nouvelle pour moi : le gazpacho de caviar. Cela n'aurait rien d'étonnant, mais allez raconter mon idée aux andalous...

Ceci dit, je m'apprête à trouver la dissidence gothique dont il était question à propos de la peinture de Buffalmacco, tout ce qui reste souterrain dans l'idéal d'une tradition artistique et littéraire propre à la ville de Florence, en chantonnant le vieux allemand dialectal du "Nibelungenlied" :

I. ÂVENTIURE

1 Uns ist in alten maeren wunders vil geseit
von haelden loebaeren, von grôzer arebeit,
von fröuden, hôchgezîten, von weinem und von klagen,
von küener recken strîten, muget ir nu wunder segen haëren.
(pardon : muget ir nu wunder hoeren sagen)

1 A nous les anciennes moeurs merveilles nous diront
des héros dans leur vieillesse aimable, des grossiers travaux,
des froufrous de la joie, des temps fraternels, des vinyles qui pleurent et des cailloux
dans la voix à la belle agonie, dans le tragique spectacle qui dure de jours,
des conneries à cheval les plus correctes, des merveilles qu'il se peut
qu'on te dise d'elles à l'instant, plongé dans le rêve qui te tue et te laisse vivant.

2. Â...

32 Dô gie ze einem münster vil manec rîcher kneht
und manec edel ritter die wîsen heten reht
daz si den tumben dienten, als in was ê getân.
si heten kurzwîle und ouch vil maneger vreuden wân.

32 ...donnèrent sur un seul monastère, où le moine du cénobe à l'indigent
nourrit de savoir et saveur; puisqu'il a la vision, ce moine, du récit
que racontent les morts depuis la tombe. Tel quel, au milieu, il l'a saisi.
Tu auras au coeur le vouloir et aussi de lunatiques viennoiseries.

...Jusqu'ici : "ils firent" et "tu piges".

"les hommes (les damnés + les saints)" et "Tarzan et Jane... ouf, je veux dire : Dante et (Virgile-Stace / Marcella-Béatrice), soit Moi et toi". Comme quoi la connexion n'est pas évidente. Il faut du travail. Il faut de l'amitié (trahie), à commencer par celle, extérieure, de Dante et Cavalcanti. Mais du moins j'ai frôlé Proust, non ?

...je pourrais aussi dire arbalète ou arbalétation, pour "travail".

(du tripalium en razzias cerebrales l'on donne au prochain-ci sur Swinburne)


...

mercredi 24 août 2011

Sur Dante XXII (les deux natures)




De nouvelles données auraient mis l'originalité du poème de Dante en question. Ce qui ne doit qu'augmenter ma curiosité. En tout cas, ce matin je n'ai fait que tourner entre des piles de livres, sans savoir par où reprendre le fil, avec l'ajout de nouveaux textes dans ma sacoche dont je n'osais pas l'immersion sans masque...

Nonobstant, j'étais plutôt de bonne humeur, la piste d'une première mouture arabe de la Divine Comédie étant le fruit d'une agréable conversation à l'atelier. Mais si je ne lis pas l'arabe, ai-je dit, quoi faire d'un originel que je ne peux traduire moi-même ? Je préfère adopter le ton quotidien de mes pensées qui est assez simple : je n'aurais d'autre que ma vanité pour paradis. D'avoir pu m'exprimer tout ce temps-là, même si, ce faisant, je laisse à la vue mes lacunes, mes manies, ma précipitation et tout ce qui reste insaisissable, le cas écoulé d'une écoute, d'un assentiment ne soit que bienveillant ou pieux, d'un regard, d'un sourire, oui, tel celui qu'arrive souvent à demander, en guise de monnaie, le mendiant, et bien, ce fait-là me suffit pour passer le lendemain matin de bonne humeur, sympathique et prêt pour une efficace inaction. Et royale ! D'où, que je me sois posée la question d'un voyage au Paradis qui ne consisterait qu'à raconter la vie sur Terre, en l'occurrence ma vie et mes hasardeuses opinions, auprès d'un ange, d'un saint ou d'un prophète crédité, ou tout simplement auprès "des jeunes"... Je veux dire, de la beauté, de la rose, ou du jasmin, finalement, un jour de tiédeur au jardin de l'asile qui est le lieu définitif de la Vie, soit l'approche de la mort. Ce dispositif semble être mis en place, aussi bien du côté social que dans son aspect architectural, dans mon travail à l'atelier. L'eau d'une inondation, qui abîme et éparpille des champignons très voyants, tels une constellation sous influence, m'ayant obligé à déclarer hors-série mes propres livres d'art numérotés et en rajouter le pourquoi à la main, mon euphorie n'a fait que s'accroître avec la petite catastrophe. Ce qui vient interrompre ma béatitude est une question dentaire, pas besoin de plus pour s'angoisser : une couronne est tombée.

Mais le fait qu'il reste soudainement tellement à lire, à relire et à écrire, et puis tellement de possibilités de bonheur dans la poursuite picturale... une couronne qui tombe ? ah, ça ne m'enlève pas le sourire, du tout, le grain de vieillesse sur mon visage. Il est plutôt rassurant de ne pas avoir l'éternel à résoudre sur le terre à terre, mais de pouvoir s'envoler tel une escarbille.

Une amie qui travaille sur les femmes derviches, Ludivine Allegue-Fuschini, auteur aussi d'un livre sur l'Apocalypse en Espagne, et bonne peintre, m'avait effrayé à Barcelone en me faisant le récit de l'efficacité des interprètes de rêves, souvent des femmes, dans la culture maghrébine traditionnelle. Rêver d'un amant ou ami intime, dont on a peu de nouvelles, le voir dans la mémoire de-privé de dents... puis apprendre la nouvelle de sa mort. Le secret des secrets est censé selon l'interprétation freudienne des rêves être le désir, ou pulsion... mais c'est la mort, c'est la plasticité destructrice, et il n'y a plus intense plaisir depuis l'enfance que la destruction du beau, de l'aimé.

Et si ! c'est ce que j'ai fait, c'était ça, mon art du collage exercé sur de vrais livres, parfois en cours de lecture, quand j'ai pris au mot "étudier la déconstruction" et que j'ai découpé aux ciseaux des bouts de La dissémination de Jacques Derrida, ou le fait d'écrire du mal sur la Divine Comédie, d'en faire une mauvaise critique de la représentation de Dieu.

Je vous rappelle que l'Enfer fait partie de Dieu...

C'est pour ça qu'il nous fait la comédie, l'enfer c'est lui aussi... Fecemi la Divina Postestate, la Somma Sapienza e 'l Primo Amore...

Il n'y a que les manichéens qui prônent la séparation du Bien et du Mal, nous proposant l'hypothèse d'un principe co-éternel, soit de deux dieux, comme Ormuz et Ahriman, mais en l'occurrence plutôt la Terre de Lumière et le Royaume des Ténèbres, deux natures (kyanin). Et ce terme ressemblant : Deux Natures qui maintiennent la métaphysique persane tout en rendant obsolètes les représentations du clergé mazdéen, par une dissidence qui allait coûter la condamnation à la peine de mort avec tourment à Mani... Peccadilles après pour nous, quand-même, l'on peut aimer le folklore dans l'ensemble, non ?

Ce passage de l'université à la misère... la poésie (populaire)... Shahrazâd...

"Ligerito..."

Alors, des raisons pour travailler sur ce qui m'a été suggéré en cours de route, si vous me donnez le temps d'apprendre l'arabe ou de me faire assister à la lecture détaillée de ce livre que je ne voudrais pas faire passer par la brûlure symbolique de l'écran et d'un moteur de recherche.

A bientôt.

...

dimanche 21 août 2011

The Speech of the Young Lady



Ocuparía el tercer lugar de una Escuela de Miniatura Nietzscheana originaria de Granada. Siguiendo el orden de Joaquín Albarracín, Raúl Gómez Reyes, y los que podamos darle una continuación. Una buena parte de los dibujos de Raúl se ha perdido, guardados demasiados años en la humedad de un subterráneo. Cliquen sobre esta frase para ver algunas miniaturas, de Raul Gomez Reyes. Joaquin, a quien no he conocido personalmente, murió joven hace dos décadas. Este tipo de miniatura corre el riesgo de todo papel, pero también con la esperanza de visibilidad de la Red, un riesgo horripilante de "black out" pesa como una de tantas espadas de Damocles que la disposición de la Historia destina a esta extraña Escuela de Miniatura Nietzscheana de Granada.

`````````````````````````````````

RÉCITS CRITIQUES

cliquez pour télécharger gratuitement le e-book en pdf. (compatible avec la plupart des ordinateurs) de ce recueil de 144 pages. Bonne lecture.

vendredi 19 août 2011

Sur Dante XXI (contre tous)




Moi, le fragile, le maladroit, comme signait ses dernières compositions au crayon Pierre Klossowski (Pierre le Maladroit), voici que je deviens père, un père quelque peu gitan qui a le pouvoir de détourner le mauvais oeil, et l'on ne répond à la sorcellerie que par la sorcellerie, malédiction gitane ou sortir le démon par la connaissance du démon. Cet ouvrage était adressé, par un automatisme tel une écholalie, admiratif, à D.K., et au projet de son salon d'un colloque autour de la Divine Comédie dont je préfère ne plus donner ici des détails.


J'aimerais bien faire entendre le death metal ("progressif") qui résonne dans ma tête, mais en vous lisant Dante, ou Cornelius Agrippa, j'aimerais dessiner un cercle parfait du Mal, tel l'iranien qui se disait le sceau des prophètes et qui était peintre, et dont la doctrine même a accompagné Augustin d'Hippone dans ses années de fornication et théories sur l'art et divination. Je pourrais m'en tenir à ce qu'Augustin soit mort alors, d'une crampe coïtale, et se trouve même pas chez les hérétiques de la Commedia, mais chez ceux de son métier d'alors, celui de Manto, et que je veux opérer par la pitié du sorcier, aux antipodes de la superstition.

Cheminant à tâtons comme ceux qui font les pas sacrés de la procession, païenne ou chrétienne, viennent les sorciers :

miravil-mente aparve esser travolto,

ciascun tra l'mento e 'l principio del casso;

chè dalle reni era tornato il volto,

ed in dietro venir li convenia,

perchè 'l veder dinanzi era lor tolto.

Forse per força già di parlasia

si travolse cosi alcun del tutto;

c'était surprenant que de voir leurs torts,

chacun sur les cogitations et les traumas de leurs cas;

ouf, que leur regard donnait du lumbago à le soutenir,

quand ils devraient venir ici, vers nous, à reculons,

puisqu'ils ne voient pas ce qu'ils ont devant eux.

Que ce soit de leur indiscrétion, de leur exhibitionnisme,

qu'ils seraient retournés comme une chaussette ?




Il serait de rigueur donner la parole à Giordano Bruno, magicien qui excelle aussi dans la grande philosophie. Mais j'ai pris machinalement Agrippa et je vais faire parler la partie des damnés :

(traduction libre de l'espagnol)

L'ire et l'anxiété, le désir de se venger, produisent de la chaleur, font rougir, amertume et soit vous font chier, soit elles vous font vomir.

Je pense qu'il n'y a personne plus terre à terre que le sorcier. Des passe-passes et des portes qu'on fait claquer en sortant. La jeunesse, qui est dans les livres comme le sève dans les vieilles bonnes tables mille fois vernies, l'été venu, ses canicules, ses lunes, la vitre latente de la résine, toujours occulte par l'oubli et par la coutume, reprend sa vie disruptive et suppure des gouttelettes gluantes, au fur des décennies plus blanche, moins dorée, tel la scorie et le mercure. Réalité du Mal, Vérité du Mal, de quoi laisser Dieu et ses ensembles de harpe toqués. Ce n'est que par la magie, par l'ascèse et la guerre totale que le manichéen opère l'épuration de cette table des âges, des Trois Moments. Ou comme à été dit par d'autres : calcification de ce qui est dit, neo-baassisme, post-sionisme, la Folie Babel, la Tour du Tarot de Marseille, qui est déjà préfigurée avec l'exactitude d'un décalque par la première planche du Purgatoire de Botticelli...

(cliquez ici pour le chapitre XXII de Sur Dante)

...

Sur Dante XX (lumen insomnem noctuam est caecitatis mementum)



Quel rapport ? l'italien et ses métamorphoses. Sinon, la découverte des sens, qui entraîne au regard d'autrui une perte de l'innocence. Mais quoi dire du respect de Ludovico (scrivens) pour ses pécheresses et ses folâtres et subtils guerriers ? Là c'est Angelica qui va faire connaissance de Medoro, son futur amant, de cette manière :

Quando Angelica vide il giovinetto
languir ferito, assai vicino a morte,
che del suo re che giacea senza tetto,
più che del proprio mal, si dolea forte;
insolita pietade in mezzo al petto
si senti entrar per disusate porte,
che le fé il duro cor tenero e molle :
e più, quando il suo caso egli narrolle.

Quand Angelika a vu le jeune homme
languir par blessure d'arme, voisin de sa mort,
et que de son guru sans abri dans l'inertie du cadavre,
plus que de son malaise de blessé, lui rendait de mots de douleur;
la pitié insolite pulsante au plexus solaire
elle a senti entre les nibards entrer par la porte rouillée du coeur,
qui le fit le calleux noyau de hardeuse rêveur :
et encore, dès qu'il a fait l'effort de raconter la vie, le bruit du sabre.

E rinovando alla memoria l'arte
ch'in India imparo già di chirugia
che par che questo studio in quella parte
e senza molto rivoltar di carte,
che 'l patre ai figli ereditario il dia,
si dispose operar con succo d'erbe,
ch'a più matura vita lo riserbe.

Elle renouvelle dans sa mémoire l'art une autre fois
qui est déjà public en Inde, les lignes de la main et la phytothérapie
il semble que ces savoirs chez les roms de là bas
sont pas factices et qu'ils ne copient
puisque dans la famille on apprend à vivre la vraie vie et ainsi soit,
elle s'apprêta à opérer du lait de l'herbe blanche,
et d'un encens qui puisse le préserver pour la vie sans maman.

E ricordossi che passando a vea
veduta un'erba in una piaggia amena;
fosse dittamo, o fosse panacea,
o non so qual, di tal effetto piena,
che stagna il sangue, e de la piaga rea
leva ogni spasmo e perigliosa pena.
La trovo non lontana, e quella colta,
dove lasciato avea Medor, diè volta.

Elle recule cordiale où elle a vu les bourgeons,
quelque part sympa dans ce lieu de vacances et carnage,
que ce fût vice ou que ce fût le transfert,
ou je ne sais traduire, je tiens aux effets,
puisque la perte stagne; et de la plaie raide de la pieuvre de Tarent,
tous les spasmes et les mutilations de l'âme elle laisse
les remords ensevelir les remords, anthropophages
à l'intérieur du corps.
Elle l'a trouvée dans le quartier, et une fois cueillie,
sur le corps qu'elle venait de quitter pour sortir, elle vient encore s'accroupir.

Le lieu de cure, le lieu d'ivresse ne peut être Enfer ni Paradis, qui ne deviennent, qui sont définitifs, si ne l'est déjà le dantesque. Nous poursuivons les traitements du Purgatoire, ses accouplements avec le feu, ses méditations dans le cendrier.

La mimique de l'amour, qu'elle se lit et se délie dans le va et vient de l'alternance des consonances. C'est si facile d'écrire le phrasé si l'on a du batteur et des bas électriques dans le lieu du coït. Sophistication veut dire facilité. Si l'on avait Dieu, si l'on avait une station radio qui toujours nous tienne dans l'extase; et vient la musique par les ondes de l'air, c'est la grande représentation du Vent, des souffles matinaux et frais, sur La naissance de Vénus, qui reviennent à Ugo Foscolo.

Ce qui est affirmatif chez Foscolo, c'est que tout en étant aussi sensuel que Ariosto, il peut se permettre des sorties misanthropes, chemin pour l'étape suivante de la séduction poétique, quand il prononce :

Che se vita è l'error, l'ira, e l'ambascia,
troppo hai del viver tuo l'ore prodotte;
or meglio vivi, e con fatiche dotte
a chi diratti antico esempj lascia.

Si tu revendiques la force vitale de l'erreur, la rage, et l'angoisse,
tu as produit suffisamment les heures pour ton plafond;
mets toi à vivre une vie meilleure, endure la fatigue dans ton moi profond
de donner exemple avec ton savoir, l'Antiquité est ta passe.

Figlio infelice, e disperato amante,
e senza patria,, a tutti aspro e a te stesso,
giovine d'anni e rugoso in sembiante,

Malheureux en tant que fils, amant sans espoir,
et sans patrie, sévère avec tout ce que tu lis et avec toi même
encore jeune d'âge et froncé du visage au pensoir,

Che stai ? breve è la vita, e lunga è l'arte;
a chi altamente oprar non è concesso
fama tentino almen libere carte.

T'attends quoi ? courte est la chance, l'Art est long à mettre
pour qui les grands projets ne seront jamais un devoir
être connu peut être vrai dans la liberté de ses lettres.

Ce qui revient à l'émission, le souffle du vent qui préside à la Naissance de Vénus et en garantit la transmission vénérienne de l'amour par l'air, par la musique. Le ton personnel pousse plus loin qu'un projet qu'on approuve, il reste interdit, suspendu, et depuis sa pendaison il répand le pollen, la spore de la seule éjaculation efficace de la pensée, la lettre, le journal intime dès qu'il s'offre sous enveloppe d'invisibilité...

(parenthèse pour avancer un chapitre)

...

Sur Dante XIX (les secrets du Purgatoire)




deux portraits
"géopolitique de l'autisme"
et
De Rerum Natura


(pour lire depuis le premier texte)


(pour lire le chapitre précédent)


Nous parlions de métamorphose... autant le prendre au sens de révolution (ou de cycle thymique, pourquoi pas ? ). Et puisqu'il en est du Maghreb dans la lecture du quotidien... allons chercher des poèmes, si l'on peut les ramener sagement à une démarche qui soit "dantesque" ou du moins "anti-dantesque". Voici ce que je suis en train de lire, The Witch of Atlas, de Shelley :

He kissed her with his beams, and made all golden
The chamber of gray rock in which she lay--
She, in that dream of joy, dissolved away.

3.
'Tis said, she first was changed into a vapour, _65
And then into a cloud, such clouds as flit,
Like splendour-winged moths about a taper,
Round the red west when the sun dies in it:
And then into a meteor, such as caper
On hill-tops when the moon is in a fit: _70
Then, into one of those mysterious stars
Which hide themselves between the Earth and Mars.

Il y a pas de mythe métamorphique sans trouvaille, soit la rime avec le mot "câpre", qui nécessite qu'on ait vu non pas seulement les petits fruits dont on fait l'assaisonnement des pizzas, mais qu'on connaisse la fleur inouïe, si à l'extrême de notre conception du floral, et qui ne pourrait être même pas être mise en parallèle avec l'orchidée, qui aurait pu lui rassembler. Puis le temps, la succession... she first... and then... and then... when the moon is in A FIT !!!

Si l'on pouvait parler de "suspense naturel", des intrigues de la Nature, là dedans...

Mon angoisse s'intéresse soudainement à ce qu'il y ait quelque chose (des "mysterious stars") entre la Terre et... la Guerre. Quelque chose qui s'immisce et se niche pour rester réservée au poète... Est-ce une tentation ou une épreuve de traduire cela en "français" ?

Il l'embrassa avec ses éclats, et fit toute dorure
la chambre de roche grise qui en était son lit --
elle, à l'heure où murmurent les joies du rêve, son être s'en dissoudre tel léger salpêtre vit.

C'est ce qu'on raconte, qu'elle au début fut dans la vapeur transmise,
ensuite dans un nuage, lorsque'à la diminution de la flamme, des nuages,
qui sont les phalènes aux épaules altérées de tatouages,
entourent le rouge occident où son cycle veut que Papillon Soleil périsse :
et puis un météore fugace, tel des fleurs de câpre les riches gages
en haut des collines quand les désordonne le serpent du temps,
celui qui ordonne la lune et souffle sur elle l'amidon
et la chaux d'une sphérique chemise :
alors, dans une de ces mystérieuses étoiles,
qui évitent la vieillesse et le naufrage
séantes sur l'espace obscur et pâle que l'on trouve
immiscé parmi la Guerre du destin et la Terre insoumise.

Soit cela notation d'une rencontre, la jeune femme quelque peu philosophe - au danger d'être poète, fou, pas-folle - qui passa hier prendre une bière à l'atelier et que j'ai dessinée dans les deux crayons couleurs que je montre sur le blog. Lignes et couleurs sont les tournures et les chromatismes de l'acide désoxyribonucléique, les arborescences - "calcification de ce qui est dit", j'attrape au vol sa phrase et reste avec la poudre d'une angoisse - de ses origines, de son récit familial :

Dans les lignes, foulard en papillote sur les cheveux serpentins, l'oeil comme un vol de tourterelle, la bouche compliquée et rouge comme un bijou cher...

Dans les couleurs, l'ordre est la recherche du malheur et l'on va vers la splendeur de la mort. Vert mystère, cabale séfarade, andalouse, Sienne au tissu, trame de l'orange et de la terre fine, le jeune couleur du merveilleux, brillant et caniculaire, puis le mauve, le mauresque du phobique, le féminin étouffé dans un arrière-fond pour que dans le visage de la poupée on frappe la blanche bouche de la touche du sang, artificielle et céramique.

Une sphère d'invisibilité pour entourer la lumière...

J'ai une pensée pour l'Arioste, qui est à côte, un volume entassé sur l'autre. Son italien a plus en commun avec mon approche de La sorcière de l'Atlas, et l'anglais de Shelley, qu'avec l'italien du Dante, discipliné pour une violence organisée sur le langage quotidien. L'Arioste est libidineux, flatteur, génial... Shelley est plus persuasif, son angoisse musicale fond dans le quotidien...

(vous pouvez lire la suite sur ce lien)


...

Dessins au crayon couleur sur feuille






d'après Balthus



Sur Dante XVIII (Botticelli Forever)


Botticelli forever


(Le chapitre précédent étant d'ordre bouddhique,
il est conseillé de passer s'exercer un peu,
en cliquant sur cette parenthèse,
si vous l'avez raté, avant de lire cela)


Il faut cher monsieur que je boive plus que ce que j'ai bu de ce rouge de Gascogne pour que je dise du bien du "dépouillement" des planches finales du Paradiso de Botticelli. Voyez mon dessin ci-haut, les bottes de la jeunette, le collier de perles... C'est bon, n'est-ce pas ? Je ne suis pas défoncé, mais... comme nous disons en Espagne, "tengo el punto". Ouais, on ne peut prendre plaisir à détailler le dessin d'une vulve frontale si l'on n'a pas pris goût à dessiner des oreilles, et bien mieux, ce serait à l'inverse que ça se passe. Je cours chez Botticelli chercher les oreilles, peut-être chez Blake ?

Et oui, c'est ce que je disais : pas une seule oreille dans des centaines de personnages. Un lobe dans la première planche du Paradis sur un plan plus généreux et, disons clairement la vérité, moins médiocre, de Béatrice qui emporte Dante aux hauteurs de l'éther, s'envolant au-dessus des arbres élancés et fragiles de l'Eden. C'est le seul visage de Béatrice de l'ensemble mini-monumental qui, par une rature, semblerait avoir du rouge à lèvres et, par une autre rature, si rare, des beaux cils à l'antimoine... Puis des oreilles acceptables en Enfer sur les grandes figures des géants enchaînés. Mais il est évident que la règle est d'éviter pour malséant le dessin d'une oreille. William Blake ne se dédit de l'interdit, lui, il fait pareil : le géant en a...

Bon, j'ai couru "chez Botticelli" pour ce qui est de ses dessins pour la Commedia, sa "période chrétienne", he, he... Je vais ouvrir l'étude d'Aby Warburg sur les deux chefs d'oeuvre païens de Botticelli (Naissance de Vénus et Le Printemps)...

... et non, pareil, mais on dirait que le Vent joufflu qui harcèle sexuellement la nymphe X. est non seulement "souffleur", mais qu'il a de quoi "entendre", curieux.

J'ouvre le Manuscrit (...) de Potocki, et je trouve ce que je cherche :

Neuvième journée

Vous jugez bien que l'espoir de jouir de l'immortalité et de posséder deux épouses célestes me donna une nouvelle ardeur pour les sciences cabalistiques, mais je fus des années avant que d'oser m'élever à une telle hauteur, et je me contentai de soumettre à mes conjurations quelques génies du dix-huitème ordre. Cependant, m'enhardissant peu à peu, j'essayai l'année passée un travail sur les premiers versets du Schir haschirim. A peine en avais-je composé une ligne qu'un bruit affreux se fit entendre, et mon château sembla s'écrouler sur ses fondements. Tout cela ne m'effraya point , au contraire, j'en conclus que mon opération était bien faite. Je passai à la seconde ligne ; lorsqu'elle fut achevée, une lampe que j'avais sur ma table sauta sur le parquet, y fit quelques bonds et alla se placer devant un grand miroir qui était au fond de ma chambre. Je regardai dans le miroir, et je vis le bout de deux pieds de femme très jolis, puis deux autres petits pieds. J'osai me flatter que ces pieds charmants appartenaient aux célestes filles de Salomon, mais je ne crus pas devoir pousser plus loin mes opérations.
Je les repris la nuit suivante, et je vis les quattre petits pieds jusqu'à la cheville. Puis la nuit d'après, je vis les jambes jusqu'aux genoux, mais le soleil sortit du signe de la Vierge, et je fus obligé de discontinuer.
Lorsque le soleil fut entré dans le signe des Gémeaux, ma soeur fit des opérations semblables aux miennes et eut une vision non moins extraordinaire, que je ne vous dirai point, par la raison qu'elle ne fait rien à mon histoire.

Dans ses lettres, Jean Potocki signale souvent la levée du vent... puis déjà que le Paradis est un lieu ambivalent à Sierra Morena, dans son connu roman, l'on trouve l'idée empirique du paradis aussi dans son voyage en Turquie :

"Le six joints de 1784..."

pardon :

"Le 6 juin de 1784, à Constantinople

"Vous serez peut-être étonné d'apprendre que dans le grand nombre de voyageurs qui abordent en cette ville, il en soit très peu qui puissent en rapporter des idées un peu exactes ; rien cependant n'est plus vrai, les plus observateurs ont épuisé leur curiosité à visiter les monuments de la Grèce, et n'envisagent les Turcs que comme les destructeurs des objets de leur culte. Ils arrivent pleins de cette idée, se logent dans le quartier des Francs, et daignent à peine traverser une fois le port pour aller voir la mosquée de Sainte-Sophie, et revenir chez eux.

"Nourrie par l'étude de l'histoire et de la littérature des Orientaux, ma curiosité m'a fait suivre une autre marche. Depuis près d'un mois, je passe les journées entières à parcourir les rues de cette capitale, sans autre but que de me rassasier du plaisir d'y être. Je me perds dans ses quartiers les plus reculés ; j'erre sans dessein et sans plan. Je m'arrête ou je poursuis ma course, décidé par le motif le plus léger. Je reviens souvent aux lieux dont on m'avait défendu l'entrée, et j'éprouve qu'il en est peu d'inaccessibles à l'opiniâtreté, et surtout à l'or. Les mots jassak, défense, olmas, cela ne se peut, les premiers qui retentissent aux oreilles d'un étranger, sont enfin étouffés par la voix de l'intérêt. Ce sentiment plus fort même que celui de la crainte, les sanctuaires de la religion, ceux de la beauté où s'élèvent et se vendent les jeunes filles destinées à faire l'ornement des harems, tous lieux que n'a jamais vus le commun des voyageurs. (...) des jeunes garçons déguisés en filles exécutèrent une danse, qui représentait les différentes nuances des plaisirs : leurs mouvements d'abord doux et modérés, devenaient successivement plus vifs, et finissaient par des vibrations que l'oeil avait peine à suivre (...) tout cela n'est rien encore, auprès de ce qui se passe tous les jours dans les mayhanés. On appelle ainsi les maisons où se vend la liqueur à laquelle la défense du prophète semble ajouter un nouveau charme. Elles sont dans des lieux retirés où l'on n'entre que par des défilés obscurs et des espèces de chatières : enfin l'on est intro duit dans des cours intérieures ornées de parterres, de volières et de jets d'eau; mais ce qui surtout y attire un grand nombre de musulmans, ce sont les poufchts, jeunes et beaux garçons, (... Potocki orne un peu de préliminaires très littéraires ce qu'il ne peut in fine raconter... puis :) mais ce métier n'est pas exempt de dangers, et demande beaucoup de conduite ; car souvent les poufchts deviennent les victimes de la jalousie et de la passion qu'ils inspirent. Voilà des goûts qui doivent sans doute faire horreur, surtout aux femmes, à moins qu'elles n'aiment mieux regarder comme un hommage qu'on leur rend, celui que l'on adresse à des êtres qui leur ressemblent assez, pour m'avoir trompé plusieurs fois, lorsqu'ils étaient déguisés pour la danse.

"Je veux, avant que de finir cette lettre, vous parler d'une débauche d'un autre genre, fort commune ici, c'est celle de l'opium ; on désigne ceux qui y sont adonnés, par le nom injurieux de tiriaki, que quelques-uns se font gloire de porter. Les moins aisés et les plus fainéants d'entre eux, se rassemblent dans un endroit nommé Tiriak-Ciarfi: là passant continuellement de l'exaltation des sens au sommeil, et du sommeil à l'exaltation, ils abrègent volontairement leurs jours, pour pouvoir les passer dans un oubli parfait d'eux-mêmes. On dit qu'ils sont doux et paisibles, pourvu qu'on ne les réveille pas dans le moment où le sommeil leur est nécessaire, ou qu'on ne les prive point du poison lent, dont ils ne peuvent plus se passer ; car alors il n'est point d'excès dont ils ne soient capables. Après le dernier incendie de Constantinople, ils se sont assemblés tumultueusement pour demander que l'on commençât par rétablir leur ciarfi, et le grand-seigneur le leur a tout de suite accordé."

Les lettres de ce récit de voyage, qui va se poursuivre sur le même ton jusqu'en Egypte, apparaissent au public comme ayant été adressées à la mère de l'auteur, dès leur premier envoi original par la poste de l'époque... Le ventre dont on réclame à être entendu est le stratagème de nos libertés ?

Aujourd'hui, dans l'état second dans lequel me met la lumière du jour d'été qui me vient filtrée, malgré les prédictions de la radio, qui prévoyaient de la pluie, j'ai réalisé pour l'énième fois la même sensation dans le déploiement des planches de Botticelli. Quel bizarre bigarré et quel majestueux ambigu dans les planches du Purgatoire... Ni Paradis, ni Enfer... lieu du passage, parsemé de prodiges, de monstres tenus, de sensations éprouvantes et prometteuses, lieu de rencontres mystérieuses, opaque et irisé, nacré... comme le sexe de la femme.

C'est pour cela que je me permets d'ajouter à l'image de toujours, en supplément, quelques deux dessins de vulves, N/B, pour pas choquer plus du nécessaire, dont ma sublime vision de la "vulve pluriclitoridienne"...





...

Mode Bureaucratique



d'après Les Sabines de J.L.David qui sont au Louvre







jeudi 18 août 2011

Sur Dante XVII (l'apparition à Sakyamouni)


Je vois
les milliers
de dieux


Je commence à tenir fanatiquement à mes fautes de syntaxe, voire aussi quelques fois de frappe, tel Vanni Fucci tenait à ses péchés. De là que je laisse intactes les phrases du "chapitre" que j'ai mis en ligne avant de dormir. Il se voulait préparation à l'évocation d'une description qui nous approche du paradisiaque chez Henri Michaux, lue au restaurant du Shangri-La, métro Iéna, avec une compulsion, j'en conviens, mal élevée qui m'a fait toujours porter sur moi des livres. Les entrées et plats piquants de Malaisie et Indonésie sont intéressants, classés selon la puissance de l'assaisonnement, mais hier soir j'étais comblé par mon livre et j'ai fait durer en plat unique une entrée de homard en vinaigrette, en prenant deux cappuccino plein sucre.

(quoi qu'il en soit, si vous cliquez ici vous allez au chapitre d'après le dîner,
qui précede le présent, de ce début d'après-midi,
Sur Dante, XVI)

Et, comme d'habitude, si besoin, je vous invite à cliquer ici,
au cas où vous voudriez reprendre depuis le premier chapitre posté
de cette mouture de travail, bonne lecture

Je me devrais d'un commentaire et d'un corollaire qui lie et établisse le paradis de la mescaline de 1964 avec le Paradiso de Dante. J'essaie juste de faire valoir la présence, auto-fictive, dans un restaurant de luxe, puis la démesure que j'ai eu de me mettre à colorier les vieilles planches phototypiques des passe-partouts de la Mission Pelliot, à l'aquarelle celle que je vous montre à l'occasion, et qui coûtent une fortune. Mais l'inondation qui à déjà anéanti pas mal de livres d'art à mon atelier (ce sont surtout ceux dont le papier glacé des reproductions d'art fait que les feuilles mouillées collent et soient impossibles à détacher sans les déchirer) m'a convaincu de l'urgence de toute intervention sur la parcelle de patrimoine culturelle que mes ressources ont mis sous mon droit de jouissance...


Henri Michaux, L'infini turbulent (Mercure de France, 1964) :

Je vois
les milliers
de dieux


J'AI VU LES MILLIERS DE DIEUX. J'ai reçu le cadeau émerveillant. A moi sans foi (sans savoir la foi que je pouvais avoir peut-être), Ils sont apparus. Ils étaient là, présents, plus présents que n'importe quoi que j'aie jamais regardé. Et c'était impossible, et je le savais, et pourtant. Pourtant ils étaient là, rangés par centaines les uns à côté des autres (mais des milliers à peine perceptibles suivaient et bien plus que des milliers, une infinité). Elles étaient là, ces personnes calmes, nobles, suspendues en l'air par une lévitation qui paraissait naturelle, Très légèrement mobiles ou plutôt animées sur place. Elles, ces personnes divines, et moi, seuls en présence.

Dans quelque chose comme de la reconnaissance, j'étais à elles.

Bonjour.

(le chapitre XVIII, cliquer ici, est un hommage
aux Lumières
intitulé Botticelli Forever)
...

Sur Dante XVI (qui en cabale donne sept)


Bah, bah, portes, séjours célestes ou infernaux, escaliers... L'on voit bien que pour Dante tout le problématique de la "vie future" réside dans le cuisant problème du LOGEMENT. D'où qu'on ait fini par parler de "squatt"...

Les Demeures de Thérèse d'Avila se laissent transiter par la pensée comme le sillon creusé est suivi et noirci de fraîcheur par l'eau, pas de labyrinthe, mais labour de la terre. Il en est d'une vision féminine qui forcément s'intéresse par l'humain, voire pour ce qu'il y a de bien chez le père... mais Dante, subjectif comme il est, est forcément sacrificiel, inhumain, son Paradis ressemble à la Tour de Babel qui aurait résolu la confusion des langues de par l'abolition du sens.

On peut me discuter que le droit au logement est respecté par l'utopie dantesque, puisque même ceux qui ne méritent pas, qui ont cumulé les dettes, ceux qui sentent mauvais, sont dûment placés quelque part... C'est l'utopie optique de Descartes, et de la perspective qui va advenir en Italie avec l'expérimentation de Masaccio, qui voulait juste se moquer (à mon avis) de Giotto, comme pourrait le faire une taupe gothique. Des lignes qu'on appelle avec un inconscient cynisme des "lignes de fuite", et qui sont là en même temps pour emprisonner et pour évincer, pour exclure tout en suggérant l'accueil de manière abstraite.

L'équivalent mathématique de Dante est bien Tolkien, qui établit que l'espace est non plus déterminé par le sujet, mais par un excédent qui devrait faire l'objet d'un partage. Seulement, une fois partagé, le géopolitique tolkienien s'avère engageant dans la montagne russe de la cotisation boursière, de la menace constante du trou noir, qui existe pour faire qu'il existe quelque chose qui n'existe pas. Une autre comédie du salut par l'attribution de non-lieux...

(Tolkien me fait penser au chevalier blanc des aventures d'Alice, qui disait de ses machin-choses : "it's my own invention", tout comme les colliers bon-marché que Christophe Colomb voulait distribuer pour fausse monnaie chez les indiens)(...on en revient au jeu d'échecs si cher à Alexandra Varrin et à Fernando Arrabal)(... il serait de laisser échapper l'occasion que de ne pas vous faire voir, parmi ces "8 dessins", le deuxième "kill your-self", inspiré d'Alex - les autres aussi viennent à propos, puisque je compte traire à réflexion la peintre et sculptrice Patience Tison, qui a posé pour le premier, et Henri Michaux, qui est aussi dessiné)

Je pressens que ces idées ne sont pas très originales. Elles viennent formuler sans trop de crédit la démarche lacanienne... CQFD

Ma protestation consiste à dire qu'entre les deux, je préfère me glisser vers un ailleurs, ni la Divina Commedia, ni The Lord of the Rings...

L'on viendrait me dire qu'il faut bien que tout récit se passe dans un espace... oui, mais à condition que... bof, j'oublie ce que j'allais dire. Bref, entre Tolkien qui veut qu'on refantasme que la Terre est plate et Dante qui montre un penchant par les structures pyramidales, surtout inversées... personne ne peut se faire accepter à l'Académie de Platon avec ces deux maîtres si nuls en mathématiques, le principe de toute intelligence platonique étant la sphère, soit quelque chose qui ne peut être de prime abord que "perçue", et non pas "inventée"...

Le récit, le littéraire, la création, passe par une acceptation "flottante" du Réel...

La formule... non pas l'addition, la soustraction étant l'action même des sens. La formule qui est le quotient de la forme, comme le dialogue est le quotient des idées... La formule, merci, nom de dieu...

Ouais, on dit "formule", je dis : mutatis mutandis ! Eureka ! mutatis mutandis...

- In novas fert animus mutatas dicere formas :

... une autre citation "de tête" d'après les Métamorphoses d'Ovide. De quoi rester que tout le besoin de formulation de la jeunesse soit d'annoncer des "mutations", des individus "mutants"...

Soit le passage des figures à travers la langue grecque vers la langue latine, le passage ou le pont, qui fait que par cette soustraction au grec le quotient latin soit "neuf". Un instinct de lycéen me ramène à déceler sans internettation le verbe décliné par interposition de l'instant K dans un verbe dont la racine "bien", plus "ok", que "feel good", peut accepter les six personnes, trois singulières, et trois plurielles.

Puis je vois le 9 dans "mutatis mutandis" dans sa qualité d'adverbe. Ce qu'on appelle un complément de circonstance, soit une pseudo-phrase conditionnelle. Le latin se fout un peu que le singulier soit pluriel ou vice-versa, neuf est tout ce qui s'approche d'un euro, de dix, de vingt, de cinquante, etc. c'est un appel à la pulsion, comme les jeunes auxquels on a fait une légère soustraction stratégique, le sacrifice d'un pion, pour les solder. "Une fois qu'on aura changé le monde..."

Et bien cette phrase, dite si élégamment en chef du premier livre des Métamorphoses, celui qui raconte :

Ante mare et terra, et, quod tegit omnia, Caelum,
unus erat toto naturae vultu in orbe,

... et l'auteur Ovide serait pour Virgile ce qu'était Cavalcanti pour Dante.

Ce début est déjà un suspense, "un seul visage", premier plan, mutatis mutandis, flash-back...

Le Ciel n'est que l'ovale du Visage, le Paradis est dans deux prunelles, dans la doublure des narines, dans la pulpe rose des lèvres qui fait pardonner les crocs... Lolita ne vieillit pas, s'appelle le recueil de nouvelles publiés par Julie Oyono.

(Il serait un peu bête de vous parler du tableau, qui est mon propos ici, et ne pas vous le faire voir... Il suffit de cliquer sur la parenthèse pour le premier huile, le plus riche en couleur)


Quand je l'ai peinte j'ai utilisé l'assurance des dessins préalables, chez quelqu'un Boulevard de Clichy, où j'avais marqué encore Juline B, son pseudonyme de blogueuse. Mais je m'étais présenté d'abord par une écriture satyrique dans toutes les directions, qui faisait don du compliment (complément ?) "innocence", "continuité adolescente". L'âge de Lolita ne change pas son visage : Lola, Julie, My Th, Marie, Nicole, Benoit, Stalker, Deville, RIP, (sur ce lien rip pose ensemble avec l'auteure - entre autres - de Dalla$ ) et rien d'autre après...

... tous des tags, on dirait.

Le calcul du sens, l'équation d'une ville comme titre d'un roman en deux parties : Dallas tout comme pour Saint Augustin il n'est pas question d'écrire Jérusalem, mais Civitas Dei, l'on ajoute la lettre du "sujet divisé", le dollar, de la Fuite en Egypte, du hiéroglyphe sur la monnaie, de l'Abraxas... Et cela vaudrait pour Divina Commedia, pour le fait que la mutation soit présente sur un livre latin en forme de mot grec.

(Pour d'autres tableaux à propos, voici les deux auteures citées,CE QUE J'APPELLE FAIRE DU FAN ART, celle de Dalla$ et celle de Lolita ne vieillit pas)

Timor fecit deos, l'on croit à quelque chose dès qu'on est un peu nerveux, ha ha ha, même les Confessions sont confuses identités.

Allons voir la métrique italienne, en amateurs : voyez cette mitraille, prise au hasard, en fin de vers : Via conio mia divenimmo uscia salimmo scheggia partimmo (les rimes se passent la torche comme les prostituées au prosti-bulle, je ne retiens des rafales qui trouent les pages du gros volume de la Societa Dantesca Italiana que le projectile "scheggia" qui pour moi est de l'étrusque - saviez vous que D.H. Lawrence était un passionné des étrusques ?...)

(toujours existe-t-il le dessin premier d'après Julie Oyono, - collection 0yono)

Des pirates méditerranéens ayant capturé des citoyens grecs, leur demande de rançon se voyait souvent acquittée par les comptes rendus des nouveautés théâtrales, dont Sophocle ? Le fait est rapporté comme récurrent. L'on peut supposer la présence de navigateurs dans les tribus monarchiques antérieures à la cristallisation du latin, dont les raffinés étrusques qui ont préoccupé l'auteur de L'amant de Lady Chatterley et d'Apocalypse. Je m'attendais avec ce dernier, qu'en étant son dernier texte d'un vie raccourcie par la maladie, ce serait un peu comme l'Eureka d'Edgar Allan Poe, et j'ai eu un début de déception, mais je les voit soudainement associés par le besoin de regarder si souplesse rhétorique en a chez le Poe terminal...

scheggia : touché et coulé,

et sinon voici le lien du post XVII (l'apparition à Sakyamouni) de Sur Dante

...